HENRY Roger

Roger Yves Léon Henry est l’avant dernier des cinq garçons d’une femme au foyer et d’un quartier-maître chauffeur. La famille réside au 5 rue de l’Harteloire à Brest, avant de s’installer dans les années 1930, à Kerhallet en Lambézellec. Roger Henry travaille dans cette commune en tant que facteur intérimaire des postes. Toujours dans les années 1930, la famille déménage dans le quartier de l’Hermitage, toujours à Lambézellec. En octobre 1939, Roger Henry commet, avec trois connaissances dont Francis Beauvais, une voie de fait sur un menuisier résidant rue Bugeaud à Brest.

À l’instauration du Service du travail obligatoire (S.T.O), le jeune facteur de Lambézellec semble avoir été visé par cette mesure. Il s’y soustrait, devenant un réfractaire. Fin d’année 1943, la famille est endeuillée par le décès de Jean, le frère ainé.

Peu d’informations sont disponibles à son sujet et l’on ignore la date précise à laquelle il a rejoint la Résistance brestoise, tout comme nous ignorons l’identité de son recruteur. Roger Henry semble appartenir au Groupement cantonal de Résistance de Lambézellec (Rattaché ultérieurement au Groupement F.F.I Brest-Est) depuis décembre 1943. En juin 1944, son groupe est inquiété et les jeunes résistants reçoivent l’ordre de gagner le secteur de Lesneven pour se mettre au vert.

Avec l’aide d’Henriette Berder, le groupe de réfugiés brestois rejoint Saint-Méen entre le 20 et 21 juin 1944. Une partie s’installe dans le bois Morizur tandis que les autres sont amenés à la ferme de Kérougon de Louis Thépaut. Ce dernier a déjà hébergé madame Berder lors des arrestations au début du mois de juin. Les F.F.I de Brest s’installent dans une vieille grange désaffectée attenante au corps de ferme. Outre Roger Henry, ce groupe comprend Jean Berlivet, Louis Berthou, Pierre Hagnéré, Jean Gouriou, Jean Le Bris, Robert Le Page, Georges Midrouillet et Joseph Nicolas. Aux brestois, s’ajoutent rapidement François Kerbrat et Jean Lamandé. Ces réfugiés forment finalement un embryon de maquis et agissent au moins une fois, en sabotant la voie ferrée Landerneau-Lesneven à hauteur de la gare du Folgoët.

Le kommando de chasse allemand I.C 343 de Landerneau est mis sur la piste du maquis de Kérougon suite à un rendez-vous à Saint-Divy avec Jean-Marie Cavalloc, entrepreneur originaire de Sizun. Comment celui-ci a t-il obtenu l’information ? Cela reste un mystère mais les Allemands décident en tout cas de mener l’enquête le 13 juillet 1944. Herbert Schaad, le sergent Friedrich Horch et le supplétif français Jean Corre se rendent dans les fermes des environs pour obtenir des précisions. La collecte est semble t-il suffisante pour qu’une fois rentrés à Landerneau, une expédition soit décidée pour le lendemain de bonne heure.

Le 14 juillet 1944 au petit matin, les Allemands investissent les abords de la ferme qui sert de maquis. Il y a bien une sentinelle en arme mais celle-ci sommeille, elle est rapidement désarmée et faite prisonnière. L’alerte est cependant donnée rapidement et une fusillade éclate entre maquisards et allemands. Les trois supplétifs français présents ce jour là du côté allemand firent également le coup de feu.

Le combat se révèle cependant inégal, notamment à cause de grenades lancées dans la ferme. Seuls Pierre Hagnéré, Georges Midrouillet et Roger Henry parviennent à s’échapper à travers champs. Un quatrième malheureux parvenu à s’extraire de la ferme tente également de fuir mais il n’a pas fait vingt mètres qu’un tir le fauche mortellement.

Parmi les victimes tuées lors de l’attaque ou abattues sommairement sur place dans la foulée, figure Jean Berlivet, Louis Berthou, François Kerbrat, Jean Gouriou, Jean-Pierre Lamandé, Jean Le Bris, Robert Le Page et Joseph Nicolas. Le fermier hébergeur, Louis Thépaut, est abattu à quelques centaines de mètres de là par les allemands pour l’aide apportée aux maquisards. D’autres fermiers des environs sont faits prisonniers et envoyés à Landerneau et relâchés rapidement sans répercussion après interrogatoire.

Les trois seuls survivants rentrent à Brest et restent en relation. Ont-ils cependant cherché à prendre contact avec leurs anciens chefs brestois ? Ils quittent la ville lors du premier exode entre le 6 et 7 août 1944 et parviennent ensuite à rejoindre les rangs du Bataillon F.F.I de Ploudalmézeau. Pierre Hagnéré, Roger Henry, Georges Midrouillet et d’autres brestois ayant rejoint le maquis forment le 4ème Groupe de combat de la 2ème Section de la 1ère Compagnie.

Composition de son groupe de combat :
 BORVON Jacques
 COSTARD Louis
 GOASDOUE René
 HAGNÉRÉ Pierre (chef de groupe)
 HENRY Roger
 JESTIN Guy
 KERBÉRÉNES François
 KÉRÉBEL Henri
 LOZACH François
 MIDROUILLET Georges
 POULIQUEN Roger
 QUEMENEUR René
 QUINQUIS Guy
 THOMAS Alexis

Avec son groupe, il prend part aux opérations de Libération du canton de Ploudalmézeau puis à la réduction de la poche allemande du Conquet. Le 28 août 1944, lors de l’attaque de la position fortifiée du Corsen, Roger Henry trouve la mort, à 23 ans.

Rapport du chef de section Beaufrère (non daté) :

" Le 26 août après-midi mon groupe franc (ndr Pierre Hagnéré) fait une patrouille sur Corsen, elle se heurte à une patrouille allemande devant la colonie de vacances de Porsmoguer. Mes hommes tuent 8 Allemands, la patrouille allemande est repoussée dans leur abris, malheureusement, un homme (Roger Henry) est tué d’une balle dans la tête." [1]

Dans son rapport, Louis Beaufrère semble se tromper dans la datation, entre le 26 et 28 août. Le registre d’état civil de Plouarzel et le registre des F.F.I décédés du Bataillon F.F.I de Ploudalmézeau confirment la date de décès de Roger Henry au 28 août 1944.

Le nom du résistant et F.F.I Roger Henry est gravé sur la stèle du maquis de Kergoff à Tréouergat. Après les suspicions (infondées) de trahison de Jean Lamandé vis à vis de l’affaire du maquis de Kerougon. Le nom du "traitre" est remplacé par celui de Roger Henry sur la stèle commémorative à Kerougon ; faussant au passage le texte sur l’embase du monument.

La sépulture de Roger Henry se trouve dans le cimetière de Kerfautras à Brest [Carré 44, Rang 9, Tombe 18]

Publiée le , par Gildas Priol, mise à jour

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Portfolio

Stèle commémorative de Tréouergat
Stèle du maquis de Kérougon
Photo Gildas Priol - 2018

Sources - Liens

  • Centre généalogique du Finistère (CGF29), registres d’état civil.
  • Archives municipales de Brest, fonds Joël Le Bras, copies des dépositions d’Herbert Schaad, Jean Corre et Gabriel Poquet en septembre 1944 (153S12), registres d’état civil (1E264 et 3E395) et liste électorale de Lambézellec en 1938 (1K/L8).
  • La Dépêche de Brest, éditions du 20 janvier 1935 et 31 octobre 1939.
  • Service historique de la Défense, dépositions de Friedrich Horch et Jean Corre, aimablement transmises par Edi Sizun.
  • Musée du Ponant de Saint-Renan, archives F.F.I du Bataillon de Ploudalmézeau.
  • BOHN Roland, Chronique d’hier -Tome 1 - La vie du Léon 1939-1945, à compte d’auteur, 1993.
  • ANDRÉ Jacques, Le Bataillon F.F.I de Ploudalmézeau, édition à compte d’auteur, Brest, 2003.
  • LE BRAS Joël, textes L’affaire Jean-Pierre Lamandé, De l’affaire BDG à l’affaire du maquis de Kérougon et Résistance de Brest-Est (2007).
  • Geneanet, notices généalogiques de Roger Henry par Jean-Luc Batany & Nadine Perrot.
  • Brest métropole, service des cimetières - sépulture de Roger Henry.
  • Service historique de la Défense de Vincennes, dossier d’homologation des faits de résistance (GR 16 P 290557) - Non consulté à ce jour.
  • Service historique de la Défense de Caen, dossier d’attribution de la mention Mort pour la France à Roger Henry (AC 21 P 54267) - Non consulté à ce jour.

Remerciements à Françoise Omnes pour la relecture.

Notes

[1ANDRÉ Jacques, Le Bataillon F.F.I de Ploudalmézeau, édition à compte d’auteur, Brest, 2003, page 155.