KEROUANTON Lucien

Lucien Yves Marie Kerouanton réside à Landerneau et pratique l’athlétisme puis le football, ce qui lui vaut d’être régulièrement cité par la presse locale dans les années 30. Il épouse Marie Bonderff, le 28 septembre 1933 à Saint-Martin-des-Champs. Bientôt, la famille s’installe rue Général Goury à Landerneau. Ouvrier de l’Arsenal de Brest, Lucien Kerouanton adhère au Parti communiste français (P.C.F) en 1934. Il milite localement dans sa ville natale mais également sur son lieu de travail jusqu’en 1939. Mobilisé à la déclaration de la Seconde Guerre mondiale, il sert en Syrie jusqu’à sa démobilisation en décembre 1940. Il retrouve Landerneau occupée par les Allemands et reprend son poste à l’Arsenal de Brest. Resté fidèle au parti après le pacte germano-soviétique, il renoue les contacts et reprend son militantisme.

En fin janvier 1941, Lucien Kerouanton rencontre à la sortie de l’Arsenal Robert Ballanger, pour intégrer la direction du groupe de l’Organisation spéciale (O.S) de l’arsenal. Ce travail clandestin de direction est mené conjointement avec Pierre Corre, Mathurin Le Gôf et Jules Lesven.

Après quelques sabotages, dont on ignore la nature, Lucien Kerouanton est rapidement suspecté. Il est arrêté à Landerneau le 3 juillet 1941, par des policiers landernéens. Transféré à Châteaubriant, il est interné au Centre de séjour surveillé de Choisel. Mais faute de preuve, il est relâché le 4 septembre et regagne Brest. Pensant être sous le coup d’une surveillance rapprochée, il se met quelque peu en retrait des actions et reste prudent. Il garde cependant le contact avec des militants et poursuit, plus discrètement, son militantisme. Il participe tout de même aux grèves patriotiques d’octobre et décembre 1941 à l’Arsenal.

Dans les premiers jours de janvier 1942, Venise Gosnat convoque Pierre Corre, Lucien Kerouanton et Jules Lesven pour une réunion afin de réorganiser les groupes brestois de l’Organisation Spéciale. Les trois résistants communistes précités sont nommés à la tête du Triangle de direction militaire pour la ville. L’objectif est de reconstituer des groupes et d’augmenter les actions par une meilleure planification et coordination. Les consignes sont claires et charge à ce Triangle de mettre fin à une activité désordonnée, mélangeant propagande et actions, en instituant une discipline militaire.

Cependant, Lucien Kerouanton continue sa tâche de propagande à Landerneau. Il s’adjoint pour ce travail local de Jean Jézéquel et Raoul Derrien.

En février 1942, le Triangle militaire des O.S décide la mise en place d’un grand coup d’éclat à l’Arsenal. Ils débutent alors l’organisation d’un vaste sabotage des sous-stations électriques où tous les communistes y travaillant devront participer. Plusieurs réunions vont donc se succéder, Lucien Kerouanton et Pierre Corre sont chargés de la préparation du matériel. Au total, neuf équipes de saboteurs sont organisées. L’action est prévue pour le 26 mars 1942 au matin. La planification est bonne et le plan se déroule sans accroc. La sous-station de l’atelier bois est détruite par Lucien Argouarc’h, Pierre Corre et Lucien Kerouanton. Il participe également à la destruction de celle des sous-marins en compagnie de Charles Cadiou.

La réplique ne tarde pas, Lucien Kerouanton est arrêté l’après-midi même mais il parvient à s’enfuir, grâce à des complicités ouvrières, du local où les Allemands l’avaient enfermé. Avec l’aide de Louis Departout il sort de l’Arsenal où une femme l’attend. C’est une voisine de Landerneau venue le prévenir que la police est chez lui. Complètement grillé, Lucien Kerouanton est hébergé par Pierre Corre durant huit jours avant de monter sur Paris pour se mettre au vert. Avant de quitter Brest, il revoit Louis Departout et Joseph Ropars qui ont participé au sabotage. Convaincus par cette action, ils lui annoncent leurs adhésions au parti.

Dans la Capitale, Lucien Kerouanton retrouve Robert Ballanger, qui désormais a d’autres fonctions. Il effectue pour son compte et avec l’aide d’un autre brestois, Jean Marc, plusieurs missions en tant que Franc-Tireur et Partisan (F.T.P). En février 1943, il retrouve Pierre Corre, lui aussi mis au vert à Paris, avec lequel il va effectuer plusieurs missions. Lucien Kerouanton, œuvrant désormais sous le pseudonyme de Duroc, est ensuite chargé de la sécurité de la direction nationale clandestine du parti et notamment celle de Benoît Frachon. Il poursuivra cette tâche jusqu’à la Libération de Paris en août 1944 et gardera cette fonction après guerre jusqu’à sa retraite.

Pour son action clandestine, il reçoit la médaille de la Résistance française en 1946.

Publiée le , par Gildas Priol, mise à jour

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Portfolio

Lucien Kerouanton (à gauche) en 1933
Crédit photo : La Dépêche de Brest, édition du 29 avril 1933, page 6.

Sources - Liens

  • Ville de Landerneau, registre d’état civil (2 E 117), aimablement transmis par Andrée Le Gall-Sanquer.
  • Ordre de la Libération, mémoire de proposition de décoration, aimablement transmis par Mathieu Blanchard (2023) et registre des médaillés de la Résistance française (J.O du 17/05/1946).
  • La Dépêche de Brest, éditions du 17 juillet 1933 et du 17 octobre 1940.
  • KERBAUL Eugène, 1270 militants du Finistère (1918-1945), édition à compte d’auteur, Paris, 1985.
  • KERBAUL Eugène, Chronique d’une section communiste de province (Brest, janvier 1935 - janvier 1943), édition à compte d’auteur, Paris, 1992.
  • BOURGEOIS Guillaume, La véritable histoire de l’Orchestre rouge, éditions Nouveau monde, Paris, 2015, pages 453 et 455.
  • Service historique de la Défense de Vincennes, dossier individuel de Résistant de Lucien Kerouanton (GR 16 P 318823) - Non consulté à ce jour.