Joseph Ferdinand Berger et son frère jumeau Henri sont les fils d’une garde barrière et d’un employé des chemins de fer. Comme ses parents, Joseph Berger entre dans le monde du travail comme manœuvre aux Chemins de fer de l’État. Durant la Première Guerre mondiale, son état de santé ne lui permet pas d’intégrer l’armée avant septembre 1916. Il sert ensuite dans différents régiments d’infanterie et s’illustre en ramenant le corps de son officier tombé durant les combats. Cet acte lui vaut d’être décoré de la Croix de Guerre 1914-1918. Démobilisé en 1919, il retrouve son emploi dans les chemins de fer.
En poste en Charente-Maritime, il épouse Marie-Eugénie Lanco (1890-1939), veuve et mère d’Eugène Stéphant (1915-1990), le 16 avril 1921 à La Rochelle et de cette union naissent André en 1922 et Marguerite en 1924. Dans la fin des années 1930, toujours dans le cadre de son travail, Joseph Berger et sa famille s’installent au 4 rue Hippolyte Violeau à Brest. Employé comme mécanicien à la Société nationale des chemins de fer français (S.N.C.F) à Brest, il aurait adhéré au Parti communiste français (P.C.F) en 1936 [1].
À la déclaration de la Seconde Guerre mondiale, Joseph Berger est trop âgé pour être mobilisé. Il reste fidèle au parti malgré le pacte germano soviétique et compte parmi les membres qui poursuivent le militantisme dans la clandestinité.
Dans la documentation de la Libération et de l’après guerre, Joseph Berger indique être entré en Résistance dès le 19 juin 1940 ; date d’entrée des troupes allemandes à Brest. Il y a lieu de pondérer le propos, dans la mesure où si le P.C.F reste actif dans la clandestinité, il n’y a pas de prise à partie de l’occupant directement. Selon Eugène Kerbaul, le cheminot Berger aurait participé en novembre 1940, au sabotage d’un train de marchandises avec d’autres résistants [2]. Cette action est cependant situationnelle et non organisée.
Au début 1941, Joseph Berger intègre l’Organisation spéciale (O.S) de la S.N.C.F. Dans les semaines qui suivent l’instauration de cette O.S, une nouvelle forme de sabotage ferroviaire voit le jour par des enlèvements ou des échanges d’étiquettes de wagons, afin de les dérouter.
Joseph Berger s’investit dans la lutte clandestine en participant à la diffusion de la propagande (collage d’affiches et tracts) du parti puis du Front national de lutte pour la libération et l’indépendance de la France (F.N) à son instauration au printemps 1941. Il cotise au Secours populaire clandestin, prête un local pour les réunions et héberge des résistants dans le besoin. Quand les groupes de l’O.S se diluent dans les Francs-tireurs et partisans (F.T.P), Joseph Berger poursuit le mouvement et indique avoir participé à différents sabotages, à des vols et à la fabrication d’explosifs ainsi qu’à de nombreux déraillements. L’absence de précisions sur les faits, les lieux et dates, ne nous permet pas d’apprécier à sa juste valeur son témoignage.
En juin 1942, Joseph Berger semble avoir recruté Jean Vallé. Il a sans doute également influencé son fils, André Berger, dans sa décision d’entrer à son tour dans la lutte clandestine. À l’automne 1942, quand la rafle de la police française décime les effectifs de la Résistance communiste brestoise, Joseph Berger et son fils ne sont pas inquiétés. La lutte continue tant bien que mal mais au début 1943 tout bascule pour la famille Berger. André est arrêté le 23 janvier 1943 tandis que Joseph Berger est à son tour arrêté le 4 février par la police française. Son fils est maintenu en détention mais lui obtient une libération quelques jours après, faute de preuve et d’aveu.
L’activité de Joseph Berger durant l’année 1943 est mal définie. Il fait sans doute profil bas suite à son arrestation et compte tenu des risques qu’encourt son fils, toujours en détention. Malheureusement, la sanction tombe pour son fils qui est condamné à mort par un tribunal militaire allemand à Paris en août 1943. André Berger est fusillé à la forteresse du Mont-Valérien, le 17 septembre 1943, aux côtés de 18 autres résistants communistes brestois.
Le 30 septembre 1943, Joseph Berger est de nouveau arrêté, par les Allemands cette fois. Il est maintenu 64 jours en détention à la prison de Pontaniou avant d’être remis en liberté, toujours faute de preuve et d’aveu. Dès sa libération, il reprend contact avec les F.T.P et probablement ceux du Groupe Giloux. Avec le démantèlement de ce groupe, qui était à l’origine de plusieurs actions à la fin 1943, le P.C.F de Brest a besoin de renouveler la direction des F.T.P. Cette responsabilité échoit à André Le Roy et Joseph Berger au début 1944.
Éprouvés par les représailles durant l’occupation, le parti et les responsables F.T.P parviendront difficilement à recruter. Restée très théorique, leur organisation comprend environ 15 à 16 groupes répartis dans la ville, composés de 8 à 12 hommes pour un effectif global de moins de 200 personnes à l’été 1944. Les groupes portent des noms de résistants F.T.P fusillés ou abattus sous l’Occupation. À titre personnel et outre ses responsabilités, Joseph Berger prend la tête du groupe Lesven. Les résistants de ce groupe portent un matricule compris entre 56 et 67 et semblent être pour la plupart des cheminots.
Composition du groupe Lesven :
56 - Joseph Berger
57 - ?
58 - Constant Barbedor
59 - ?
60 - ?
61 - ?
62 - ?
63 - ?
64 - ?
65 - ?
66 - ?
67 - Jean Vallé
L’organisation se précise dans les semaines qui suivent le débarquement en Normandie. Il est prévu qu’au début des combats, ces petites formations soient réparties dans des détachements :
Détachements F.T.P de Brest :
– Liberté - Groupes Giloux, Teurroc, Melou et Vuillemin - Sous les ordres de Jean Le Pape
– Égalité - Groupes Moreau, Le Borgne, Argouarch - Sous les ordres de Raymond Bouscatier
– Fraternité - Groupes Lesven, Monot, Boucher - Sous les ordres de Jean Vallé
– Justice - Groupes Le Bail et ? (Informations manquantes)
Les F.T.P s’organisent depuis leur poste de commandement établi dans la cantine de la rue de la République à Brest. Ils disposent également de trois autres caches en ville et peuvent s’appuyer sur les bases arrières (maquis) du Relecq-Kerhuon et de Coat-Méal.
Les Forces françaises de l’intérieur (F.F.I) approchent les F.T.P pour conjuguer leurs forces, qui restent malgré tout très théoriques, en particulier sur la question de l’armement. Les F.F.I escomptent amalgamer tous les patriotes pour créer 5 compagnies de combat. Il est envisagé que Joseph Berger prendrait la tête de la 5ème Compagnie mixte, dite Compagnie Koenig.
Le 18 juillet 1944, Joseph Berger assiste à l’exécution commanditée du policier collaborateur Jean Blaize, par Georges Mélou, membre des F.T.P. L’opération coute cependant la vie à ce dernier.
L’évacuation de la ville au début d’août 1944 voit des tensions apparaître entre les deux chefs F.T.P ; Joseph Berger s’enferme à Brest avec son Groupe-franc Marc tandis qu’André Le Roy rassemble le gros de la troupe à Kergroadez et forme la Compagnie F.T.P Michel.
Avec le Groupe-franc Marc, Joseph Berger harcèle les troupes allemandes dans Brest. Ils récupèrent des armes et explosifs et se permettent même de subtiliser la voiture de la feldgendarmerie. Il reste dans Brest assiégé, en toute connaissance des risques qu’il encourt. Le quartier général du groupe s’établit au 13 rue Coat-ar-Guéven. Le 18 août 1944, les allemands parviennent à localiser les F.T.P et font trois prisonniers : Marcel Cousquer, Alfred Jameau et Pierre Gourlaouen. Ces trois résistants sont exécutés sommairement.
Son activité durant la seconde partie du Siège de Brest est très mal définie.
Dans les semaines et mois qui suivent la Libération, Joseph Berger sera membre d’un tribunal d’épuration à Brest. Après guerre, Joseph Berger réside au 28 rue Laennec et épouse en secondes noces Augustine Didou (1917-2006), le 17 août 1945 à Brest.