Frantz Marcel (prénom usuel) Boucher, suit des études classiques à l’école Vauban à Brest puis entre comme mécanicien à l’Arsenal. Il réside à Recouvrance, au 16 rue du Carpon et adhère aux Jeunesses Communistes et au Parti Communiste Français (P.C.F) en 1941. Il milite et diffuse la propagande du parti à Brest.
En mars 1942, il intègre la branche Arsenal de l’Organisation Spéciale (O.S) de Brest, et rejoint ainsi la lutte armée contre l’occupant allemand. Il fait partie du groupe de Pierre Corre, comprenant une cinquantaine de résistants. Ensuite versé Francs-Tireurs et Partisans (F.T.P), il assomme un officier allemand le 11 novembre 1942 vers 19 heures rue Amiral Linois avec Maurice Le Flem et Hervé Coatalem. L’objectif est de lui voler son arme mais l’opération tourne mal quand les trois brestois sont pris en chasse par une patrouille allemande de passage. Hervé Coatalem est coincé rue Jean Macé et violemment frappé à coups de crosses. Marcel Boucher participe également à l’attentat envers les troupes d’occupation devant le cinéma Eden dans la soirée du 1er janvier 1943 avec Yves Giloux et Charles Coatélan, provoquant cinq blessés.
Les diverses arrestations, au sein de la résistance communiste brestoise, ébranlent les formations et groupes clandestins. Après l’arrestation d’Yves Giloux, Jean-Pierre Reste reprend la suite et réorganise le groupement avec Marcel Boucher et Charles Coatélan. Cette formation prend désormais le nom de groupe Giloux.
Entre novembre et décembre 1943, il participe à des opérations de sabotages de voies ferrées entre Brest et Landerneau. Notamment au déraillement du 5 décembre 1943. Car depuis octobre 1943, le Groupe Lambert prépare son premier sabotage ferroviaire. Les résistants optent pour la ligne reliant Quimper à Landerneau. Pour cette action, les landernéens s’adjoignent de l’aide précieuse de Marcel Boucher et René Hascoët de Brest. Les deux brestois arrivent par le dernier train de Brest et sont récupérés par Jean Sizorn et Marcel Peucat. Le rendez-vous est pris à 22 heures à l’endroit choisi, les jeunes saboteurs s’y rendent en vélos. Dans leurs affaires, les brestois ont apporté les clés S.N.C.F. pour déboulonner les éclisses et les traverses. Henri Lambert a déployé pour cette opération des hommes dans les environs pour palier aux éventuels problèmes et a même convenu que les hommes du docteur Jean Le Bras soient de la partie. Le sabotage est effectué en 45 minutes puis le commando s’éclipse dans la nature. Certains dormiront dans le bois de Pencran jusqu’au lever du couvre feu. Jean Sizorn, Marcel Peucat et les deux brestois descendent jusqu’à la rue de Ploudiry pour passer le reste de la nuit dans l’atelier Sizorn. Le 5 décembre à 00h30, le train PV Q14 s’engage sur la voie et déraille en partie avec deux machines et deux wagons hors piste. La voie sera immobilisée une journée et demi.
Marcel Boucher aurait, à des périodes inconnues, également participé à la recherche et au transport d’armes, à des attaques à mains armées et à la destruction de pylônes électriques. Noël 1943, une nouvelle vague d’arrestations touche les communistes. Diminué et traqué le groupe se disperse. Marcel Boucher quitte Brest et se dirige vers Trédudon en Berrien avec Guy Raoul et André Garrec. Ils y retrouvent Albert Yvinec et son petit groupe de maquisards. Les sept hommes se cachent à la ferme du Goënidou. Parmi leur prévision d’actions, il y a le sabotage de l’usine de Saint-Herbot par dynamitage du barrage de la réserve d’eau de Brennilis. Mais pour ce faire, il faut de l’explosif que Boucher et Yvinec s’apprêtent à aller dérober à la poudrerie de Pont-de-Buis.
Le projet est avorté quand une patrouille allemande débarque, le 3 février 1944, à la ferme où les résistants se cachent. Il s’agit d’un officier et d’un soldat allemand qui font le tour du secteur pour demander à la population d’évacuer temporairement les lieux en raison de séances de tirs de mortiers à Roc’h Trédudon. Curieux, l’allemand insiste pour visiter la ferme, il lui en coûte la vie, abattu par Marcel Boucher. Le soldat allemand qui l’accompagne est lui abattu par Jean Coguiec.
Craignant des représailles, le groupe se disperse et les trois brestois veulent regagner Brest. Ils passent semble t-il par Pleyber-Christ et arrivent à Landerneau dans la soirée où ils passent la nuit chez Jean Sizorn. Le lendemain, Marcel Boucher, Guy Raoul et André Garrec reprennent la route mais vers 17 heures ils sont arrêtés par un barrage allemand de la feldgendarmerie. De là, l’histoire diffère et deux versions s’opposent pour, hélas, s’accorder sur le sort final.
Rapport de la gendarmerie française du 5 février 1944
Le 4 février 1944, vers 17 heures, sur la vieille route romaine La Forest-Landerneau et Pont-Mesgrall, deux gendarmes allemands ont essuyé le feu de trois individus qu’ils voulaient contrôler. Un gendarme allemand a été tué et le second blessé. Les trois civils ont été tués par le gendarme blessé. Le cultivateur Bihan Podel, de Kerlarhan à Landerneau, et son commis ont été témoins de l’incident. Le commis a été retenu par les Allemands jusqu’à présent. Le Bihan-Podel déclare que les civils étaient porteurs d’une valise et ont tiré les premiers une rafale de mitraillette sur les gendarmes allemands. L’identité des trois civils n’a pu être obtenue jusqu’à présent.
Ce n’est que le 9 février 1944, que la gendarmerie française est mise au courant par la Geheime Feldpolizei (G.F.P) de Brest, de l’identité des trois résistants. La gendarmerie indique par la suite que ces individus étaient les auteurs de nombreux attentats et cambriolages à Brest et dans la région. Ils étaient l’objet de recherches de la part de la police de Sûreté de Rennes, qui les signalait dangereux et armés.
Version d’Eugène Kerbaul en 1985
Dans son ouvrage, 1270 militants du Finistère (1918-1945), il indique que le retour à Brest du groupe de Marcel Boucher est motivé par le renforcement des effectifs se trouvant à Brest et avec comme premier objectif, tenter un coup de main sur la Pyrotechnie de Saint-Nicolas.
Après avoir contourné Landerneau, Boucher scinde son groupement en deux. Lui-même conduira le premier groupe qui comprend, en plus de Boucher, Guy Raoul et André Garrec. Mission : se diriger vers Guipavas par la voie la plus directe. Mais ce premier groupe a à peine dépassé Landerneau qu’il tombe sur une patrouille de la Feldgendarmerie qui veut fouiller les valises dont sont porteurs les F.T.P. Or, elles contiennent des armes. Les F.T.P n’ont pas d’hésitation, et bénéficiant de l’effet de surprise, abattent deux Allemands. Mais l’un des Français est blessé - on ne saura jamais lequel.
Tous trois parviennent à se replier vers un endroit isolé, une carrière, à La Palud, selon certains témoignages. Cependant une femme a entendu les coups de feu, Mme X..., collaboratrice "horizontale", qui alerte la Feldgendarmerie. Celle-ci envoie 30 élèves de l’école de Feldgendarmerie de Landerneau dans la direction qui lui est précisée par la femme, et ils ne tardent pas à localiser les résistants en train de soigner leur blessé, qu’ils n’ont pas voulu abandonner.
Le combat s’engage, inégal. Écrasé sous le nombre, les trois F.T.P - le blessé a fait le coup de feu comme ses camarades, succombent. Boucher, Garrec et Raoul ont infligé de lourdes pertes à l’ennemi avant l’épuisement de leurs cartouches. Ils seront massacrés sur place.
Au final, les deux versions divergentes arrivent à la même funeste conclusion. Les corps ne seront jamais retrouvés, probablement inhumés en secret par les allemands dans la région de Landerneau. Cette pratique était courante pour éviter qu’on puisse rendre hommage aux "Terroristen ".
Courant 1944, en son hommage, les résistants de Brest attribuent son nom au groupement cantonal Brest-Ouest. En janvier 1946 il est nommé sous-lieutenant à titre posthume. Le mois suivant, est apposé sur la route menant de La Grande-Palud à Guipavas, une plaque en hommage aux trois résistants. En 1952, il est élevé au grade de Chevalier de la Légion d’honneur à titre posthume. Il est également récipiendaire de la Croix de Guerre 1939-1945, avec palme. La cellule du parti communiste de Recouvrance portait son nom en sa mémoire. Une rue du Valy-Hir à Brest fut renommée rue Marcel Boucher en 1977.
Leur mémoire s’étiola avec le temps, malgré les fleurs régulièrement déposées près de la plaque. En 2020, une action est menée pour refaire une plaque commémorative et déplacer son emplacement non loin, pour la rendre plus accessible à tous. La glissière de sécurité et le flux de véhicules circulant sur cet axe routier important, ne permettant plus aucune cérémonie ni recueillement.