Henri Lambert est originaire des Ardennes. Militaire de carrière au 48ème Régiment d’infanterie (48e R.I), il épouse Marie Perrot, le 9 novembre 1931 à Landerneau et de cette union naîtront trois enfants ; Jean-Paul en 1932, Henri en 1935 et Annie en 1944. La famille réside à Landerneau, au 40 rue de Daoulas. Durant la Bataille de France au printemps 1940, l’adjudant Henri Lambert est blessé par un éclat d’obus à la main gauche et fait prisonnier le 28 mai 1940 à Dunkerque. Interné au Stalag II-A de Neubrandenburg dans le Nord-Est de l’Allemagne, il tente à plusieurs reprises de s’évader, en vain. Finalement, il obtient un rapatriement sanitaire en juillet 1942. Henri Lambert retourne alors à Landerneau et trouve un emploi (presque fictif) comme comptable à l’Office agricole de la ville.
La date de son entrée en résistance n’est pas certaine. L’intéressé indique qu’il a rejoint la lutte clandestine dès septembre 1942, son épouse nuance et indique pour sa part ; fin d’année 1942. Si des discussions ont pu avoir lieu dans cette période, démontrant une aversion de l’occupant, la décision concrète de fonder le Groupe Lambert n’est adoptée qu’en janvier 1943 par Henri Lambert, son camarade de régiment Marcel Briand, Marcel Peucat et Jean Sizorn lors d’une réunion chez Marie-Anne et Jean Poudoulec, rue des Boucheries à Landerneau. Bien qu’avide d’agir, le groupe va d’abord se structurer, les premiers mois sont consacrés à l’organisation, aux repérages ainsi qu’au recrutement de volontaires. Au mois de mars 1943, le groupe a triplé et comporte une douzaine de membres. La récupération de matériels débute et des vols sont commis dans des carrières pour obtenir des explosifs. On vole également des bottes et quelques armes pour les futures opérations et l’instruction des jeunes. L’un des premiers sabotages est effectué (à une date inconnue) sur l’élévateur de pâte de la boulangerie de la Grande Palud, qui fabrique du pain pour la Kriegsmarine.
Si le groupe semble s’être constitué de manière autonome, il sera en contact avec plusieurs mouvements de Résistance, jetant un peu plus le brouillard sur l’appartenance réelle à telle ou telle organisation clandestine. Si l’on en croit les témoignages de Marcel Peucat et Jean Sizorn [1], la primeur reviendrait à Mathieu Donnart du mouvement Libération-Nord (L.N). Sans que l’on sache par quel truchement, ce brestois originaire de Landerneau aurait approché le groupe assez rapidement. Henri Lambert revendique avoir été son adjoint pour Landerneau et semble s’être rendu dans la région de Rosporden vers mai 1943 pour recruter le gendarme Robert Ricco (1908-1992) dans le mouvement.
De plus, selon Marie Lambert le couple aurait commencé à héberger des Francs-Tireurs et Partisans (F.T.P) en juin 1943. Si cela n’a pu être pour le moment recoupé, les divers témoignages s’accordent néanmoins sur l’établissement d’un lien entre les landernéens avec ce mouvement et son pendant politique ; le Front National (F.N). Les détails ne nous sont pas connus mais avant août 1943, le couple Lambert semble être en liaison avec Albert Jaouen [2] et Daniel Trellu. Par la suite, le Groupe Lambert se trouve en relation avec André Lagoguet de Landerneau et par résonnance, avec le Groupe Giloux de Brest. À partir d’octobre 1943, Henri Lambert et ses hommes planifient un sabotage ferroviaire. En guise d’entame, le Groupe Giloux ouvre la voie et effectue deux sabotages ferroviaires les 7 novembre et 1er décembre 1943, avant de venir mettre leur expérience à disposition du Groupe Lambert pour le sabotage dans la nuit du 4 au 5 décembre et les suivants. Des destructions de lignes électriques seront également effectuées.
Selon François Broc’h, les landernéens du Groupe Lambert rencontrent également Pierre Bernard, du mouvement Défense de la France (D.F) entre le 14 et 20 octobre 1943. Ce dernier n’ayant aucune attache dans le secteur, il faut surement y voir l’entremise du docteur Jean Le Bras. Ceci reste à confirmer, il est possible que le rapprochement soit encore plus tardif, lors de l’amorce du rapprochement entre ces deux structures en décembre 1943. Il n’en demeure pas moins que ces deux mouvements s’entraideront ponctuellement lors des sabotages ferroviaires dans la région de Landerneau à la fin de l’année 1943, notamment celui effectué dans la nuit du 4 au 5 décembre 1943 entre Dirinon et Landerneau.
C’est très probablement par Libération-Nord (L.N) qu’Henri Lambert bascule dans l’Armée secrète (A.S) à la fin de l’année 1943. Nommé Chef départemental du Service national maquis (S.N.M) pour le Finistère par Henri Bouret [3], le landernéen noue contact avec Joseph Hervé, alias Bob, pour lui demander de prendre en charge le Service national maquis de la région de Douarnenez. Ce poste l’amène également à se rendre en compagnie de Marcel Briand et Marcel Peucat au maquis de Saint-Yvieux à Plerguer en Ille et Vilaine. Ils y forment les quelques réfractaires-maquisards à l’utilisation d’armes mais vendu aux allemands par un français, le maquis est attaqué dans la matinée du 19 décembre 1943.
Fait prisonnier, Henri Lambert est interné à la prison Jacques Cartier à Rennes puis transféré au camp de concentration de Compiègne. Il est déporté à Buchenwald où il est employé aux travaux forcés dans une usine d’armement, de janvier 1944 jusqu’en avril 1945. Libéré par l’avance des alliés, il est rapatrié en France en mai 1945. Il reprend son poste dans l’armée à l’issue des combats.
Pour son engagement clandestin, il reçoit en 1946 la médaille de la Résistance française et la Croix de Guerre 1939-1945, avec palme. Plus tard, l’Armée va l’envoyer en Algérie et la guerre d’Indochine commençant, il y est transféré. Il ne peut se soustraire à ses obligations militaires. C’est alors que sa femme et lui se séparent en 1951 ; elle militant pour la paix au sein du Parti communiste français (P.C.F).