PELLEN René

René Pellen est étudiant à Brest quand la Seconde Guerre mondiale éclate. À la débâcle en juin 1940, son frère aîné Joseph (1920-1991) quitte la France pour rallier l’Angleterre et s’engage dans les Français libres ( F.F.L). René Pellen souhaitait le suivre mais devant le refus de sa mère de le laisser partir, il s’y résout. L’occupation débute et les études reprennent pour René Pellen qui est désormais en mathématiques spéciales. Suite aux nombreux bombardements sur Brest en 1941, le lycée est fermé, le jeune étudiant brestois est alors envoyé au collège Stanislas sur Paris pour reprendre les cours.

René Pellen témoigne de l’atmosphère régnant à Paris :

« j’ai quitté une Bretagne profondément gaulliste pour une capitale soutenant ouvertement le régime de Vichy. Pour exemple, en avril 1944, le maréchal Pétain vient à Paris et y est reçu par la population de matière triomphale. Ce qui est assez ironique quand on sait que le même accueil fut réservé quelques mois seulement après à de Gaulle. » [1]

En juin 1944, les concours sont ajournés suite au débarquement des Alliés en Normandie. Dans la foulée, René Pellen et deux amis décident de revenir en Bretagne. Le trajet s’effectue non sans mal en bicyclette. Ils sont obligés d’effectuer de grands détours et passent par Orléans puis filent vers le centre Bretagne. Arrivés à Carhaix, les jeunes étudiants passent devant des résistants pendus en représailles. De retour à Brest, René Pellen doit encore parcourir quelques kilomètres pour rallier la maison de vacances de sa famille au Trez Hir. C’est là que l’attendent les siens, réfugiés en dehors de Brest pour échapper aux bombardements réguliers sur la ville.

Outre sa famille, René Pellen retrouve des camarades et amis de longue date, dont Jean Mével, réfractaire au Service du travail obligatoire (S.T.O) vivant dans la clandestinité. Ce dernier est en liaison avec les Forces françaises de l’intérieur (F.F.I) qui recrutent des volontaires pour les combats à venir ; il propose en juillet 1944 à René Pellen d’intégrer l’effectif. L’affaire est entendue, la veille débute alors pour l’étudiant brestois qui guette désormais l’ordre de ralliement. Celui-ci parvient début août 1944 après le parachutage avorté de Locmaria-Plouzané. Consigne est donnée aux volontaires de rejoindre le secteur de Tréouergat où se trouve un important maquis de rassemblement. René Pellen s’y rend avec d’autres jeunes de Plougonvelin et fête ses vingt ans au maquis.

Le 21 août 1944, il est affecté à titre provisoire à la 1ère Section de la Compagnie F.F.I de Saint-Renan. Il ne tarde pas à être placé au sein du 4ème Groupe de cette section. La majeure partie du groupe est composée de jeunes de Plouzané.

Composition du groupe :
 CALLAC François
 CLOÂTRE Paul
 GENTIL Jean
 GENTIL Joseph
 GENTIL Marcel
 GENTIL Michel
 GENTIL Yves
 HALL Jean (1er chef du groupe)
 LE MAO Claude
 PELLEN René
 QUEMENEUR François
 ROLLAND Henri

Après une rapide instruction au maniement des armes, les patrouilles s’enchaînent dans le secteur de Lanrivoaré et dans le Nord de Saint-Renan tandis que les allemands renforcent leurs positions autour Brest, Guipavas et du Conquet. Toute la compagnie participe à la réduction de cette poche en passant par Saint-Renan, Lamber, Kervadéza puis Locmaria-Plouzané. Viennent ensuite les combats à Plougonvelin où le 1er septembre 1944, le groupe de René Pellen fait une incursion dans les lignes allemandes et parvient à faire de nombreux prisonniers.

Enhardis, ils décident d’y retourner, notamment pour récupérer le matériel mais à l’approche de la position, ils sont accueillis par des tirs et des grenades. René Pellen et d’autres F.F.I de son groupe sont blessés par des éclats de grenade. Les blessés se rendent jusqu’à l’hôpital de campagne américain situé à Kervadéza en Ploumoguer pour les soins. L’issue aurait pu être dramatique pour le groupe, le même jour, deux F.F.I de la Compagnie sont tués dans le même secteur lors d’une opération similaire. L’un d’eux, Allain Le Guen, avait l’habitude de réaliser des coups audacieux et s’accompagnait souvent de René Pellen pour ces tâches.

Le jour même, René Pellen regagne les rangs des F.F.I au front. Les combats reprennent et la mort le frôle de peu une nouvelle fois dans la descente du Trez Hir. La Compagnie est engagée jusqu’au 10 septembre 1944, date de la reddition complète de la poche allemande dans le secteur du Conquet.

René Pellen relate l’âpreté de la Libération à Plougonvelin :

« Après la libération, il y avait beaucoup de va et vient à la mairie. Je m’y trouvais au moment où les filles étaient tondues. J’étais rentré par la porte de la mairie pour une affaire quand l’attroupement dans la cour m’a attiré. C’est en sortant dans la cour que je vois les gens descendant la rue suite aux obsèques du recteur. Dans la cour de la mairie, des FFI que je ne connais pas sont en train de tondre une jeune femme qui s’est longtemps compromise avec les Allemands ainsi qu’une dame plus âgée, une fermière, qui aurait beaucoup trafiqué. Je trouve ces représailles totalement anormales et je reste médusé devant la foule, qui devrait être recueillie à la suite des obsèques, se déchaînant envers les femmes tondues. Notamment les spectatrices qui sont accrochées aux grilles du jardin de la mairie et qui scandent « tondez-les ». D’autres femmes, arrêtées, attendent elles aussi le châtiment. Je ne reste pas plus longtemps devant ce spectacle et je cherche à faire prévenir Michel Quéré. Celui-ci arrivera sans trop tarder et mettra fin à ce lynchage. C’est ultérieurement, que j’ai appris que les FFI qui tondaient les filles étaient de Lannilis. Car l’un d’entre eux avait travaillé à Plougonvelin dans un domicile d’une villa réquisitionnée par les Allemands. » [2]

Après guerre, René Pellen épouse Odile Ploué avec qui il aura trois enfants. Il fait une carrière d’ingénieur chez Alsthom avant de prendre sa retraite à Plougonvelin. Avec les anciens F.F.I du canton, René Pellen participera aux actions mémorielles et aux cérémonies patriotiques jusqu’à la fin de sa vie.

Publiée le , par Gildas Priol, mise à jour

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Portfolio

Roger Priol et René Pellen (2013)
Crédit photo : Gildas Priol
F.F.I de Plougonvelin (après guerre)
Cette photo n’est pas datée, elle est prise après guerre lors d’une cérémonie où participent les F.F.I de Plougonvelin.
Crédit photo : Gildas Priol - Tous droits réservés
René Pellen (2014)
Crédit photo : POD
René Pellen après guerre
Crédit photo : Famille Pellen
Jean Mével (gauche) et René Pellen (droite)
Crédit photo : Famille Pellen

Sources - Liens

  • René Pellen, témoignages et iconographie.
  • Musée du Ponant à Saint-Renan, fonds Baptiste Faucher, archives de la Compagnie F.F.I de Saint-Renan.

Remerciements à Françoise Omnes pour la relecture.

Notes

[1Témoignage oral de René Pellen, recueilli par Gildas Priol en 2014.

[2Témoignage oral de René Pellen, recueilli par Gildas Priol en 2015.