Corentin Jacques Marie Le Goff fait des études pour devenir Clerc de notaire. Il est cependant mobilisé en 1915 durant la Première Guerre mondiale. Le finistérien combat sur le front et monte rapidement en grade. Blessé sérieusement en août 1917 dans la région de Verdun, il est capturé par l’ennemi et porté disparu. Libéré après l’armistice, il obtient le grade de lieutenant de réserve avec une invalidé prononcée de la vision, il est donc mis hors cadres. Pour sa tenue au front, sa blessure et sa captivité, Corentin Le Goff est nommé Chevalier de la Légion d’honneur en 1919. Il est également décoré de la Croix de Guerre 1914-1918, avec palmes, de la médaille Interalliée de la Victoire et de la médaille commémorative de la Grande Guerre.
Rendu à la vie civile, il reprend ses activités professionnelles et épouse Marie Hénaff (1899-1952), le 3 septembre 1922 à Pouldreuzic et de cette union naissent cinq enfants. Sa carrière le fait devenir notaire à Hanvec puis à Plougastel-Daoulas. Il s’investit également dans la vie politique et associative locale, notamment dans l’Amicale des sous-officiers de réserve (S.O.R). Quand la Seconde Guerre mondiale éclate, le notaire n’est pas mobilisé, il reste donc à son poste en sa commune. Au printemps 1941, le maire de Plougastel-Daoulas, François Guivarch, est souffrant et doit se faire remplacer. Après sa démission, le conseil municipal se réunit en juillet 1941 et c’est au notaire Corentin Le Goff de devenir maire de Plougastel-Daoulas. Fonction qu’il assume jusqu’au début de l’année 1943 avant d’être remplacé le 23 février 1943 par Jean Fournier.
Corentin Le Goff serait entré en résistance en mai 1943 en intégrant le réseau Barnsby. La mission de ce réseau est mal connue à ce jour, il est parfois question d’évasion d’aviateurs, parfois de collecte de renseignements sur les positions ennemies. N’ayant pas fait l’objet d’une homologation nationale, cette structure clandestine reste nébuleuse, tant sur ses actions que ses agents. Progressivement, par l’intermédiaire de son réseau le notaire aurait noué des contacts avec le mouvement Libération Nord (L.N) de Brest et notamment avec Edouard Riban, François Quéffélec, Albert Le Goff et un certain Le Titeux de Paris. Le responsable des F.F.I du Finistère, Mathieu Donnart, est également hébergé à plusieurs reprises à Plougastel-Daoulas. La mairie lui fournit de surcroît, de faux papiers au nom de Duveau. Cette aide administrative et matérielle sera aussi dispensée aux réfractaires du Service obligatoire du travail (S.T.O) de la commune.
Avec ces nouvelles relations, débute entre août-septembre et novembre 1943, le recrutement de volontaires prêts à prendre les armes au sein de l’Armée secrète (A.S). Corentin Le Goff s’applique à cette tâche ; grâce au noyau de patriotes de sa commune et de résistants du réseau Barnsby, il parvient à rassembler un effectif suffisant pour former une section. En janvier ou mars 1944, il est nommé chef communal avant de prendre en mai 1944, la direction des F.F.I du canton de Plougastel-Daoulas. Il a alors pour mission de coordonner les différentes sections de son unité combattante et de coordonner toutes les actions et la logistiques pour ses hommes. Le notaire doit également centraliser les renseignements sur les positions allemandes de son secteur et préparer un plan d’actions à mener au moment de l’insurrection. Les sections F.F.I de Plougastel-Daoulas, d’Irvillac, de Daoulas, de l’Hôpital-Camfrout et de Logonna-Daoulas sont sous ses ordres. À celles-ci s’ajoutent des effectifs épars des communes de Loperhet, Saint-Urbain et Dirinon. Entre fin 1943 et l’été 1944, c’est près de 175 hommes qui seront levés dans le canton.
Mais pour engager les combats, encore faut-il disposer d’armes et de munitions. Peu avant les hostilités, le stock disponible reste famélique pour les F.F.I de Plougastel-Daoulas. Corentin Le Goff indique disposer pour équiper son effectif d’une quinzaine de fusils Mauser et de quelques armes provenant du parachutage de mars 1944 dans le centre Finistère. Il avait été convenu que sur le terrain de parachutage, codé Orphée, soit largués pour le canton de Plougastel des contenairs d’armes. Attendu dans la nuit du 2 au 3 août 1944, le terrain est finalement refusé le 30 juillet pour cause d’une D.C.A allemande trop importante aux alentours, tout comme ceux de Guipavas et Landerneau.
Au 5 août 1944, les F.F.I relancent par radio, grâce à la mission Jedburgh Horace, une demande d’armement, en vain. Ce même jour, Corentin Le Goff assiste à la réunion des chefs cantonaux à Gouesnou. Il reçoit comme ordre d’empêcher les destructions du pont Albert-Louppe et du viaduc de Daoulas. Pour leur venir en aide, Ils sont informés qu’une centaine de parachutistes français viendront les épauler. Il n’en sera rien, seul le Stick n°1 d’Edgard Tupët-Thomé prendra contact avec les sections F.F.I d’Irvillac et de Plougastel-Daoulas.
Sans armes ou presque, les hommes de Corentin Le Goff se plaignent amèrement d’être démunis. Ils ne peuvent que rarement engager le combat contre l’occupant qui lui fait replier ses troupes d’une partie du département vers Brest. Estimé à 750 soldats avant les combats, les F.F.I pensent alors avoir affaire à près de 4500 allemands qui se retranchent sur leurs positions. La première quinzaine d’août est plutôt passive pour les F.F.I du canton, qui maintiennent entre eux les liaisons tout en multipliant la collecte de renseignements sur les dispositifs ennemis. À cette situation déjà particulière, s’ajoutent les nombreux réfugiés de l’agglomération brestoise fuyant les combats.
Le 16 août 1944, la section d’Irvillac est prise à partie avec d’autres unités F.F.I et F.T.P lors du passage des parachutistes allemands revenant d’un raid sur Brasparts. Le même jour, ordre est donné aux civils d’évacuer Plougastel-Daoulas. Corentin Le Goff et ses hommes, trop légèrement équipés, se mêlent aux civils et gagnent Landerneau. Les jours suivant la compagnie se reforme et s’équipe. Cette réorganisation lui permet d’être enfin prête au combat. Elle est déployée pour boucler la presqu’île de l’Armorique, entre l’Elorn et la rivière de Daoulas. L’unité de Corentin Le Goff combat à Loperhet, Dirinon.
Corentin Le Goff relate la difficulté de coordination avec les troupes américaines :
« Les américains ne veulent pas que les sections entières se joignent à eux pour les combats mais parfois certains officiers acceptent les offres de nos patrouilles et de nos guides qui connaissent admirablement leur commune, et rendent ainsi d’inappréciables services. »
Jusqu’au 28 août 1944, une partie de la compagnie reste en formation à Landerneau et s’occupe de diverses tâches. Ce même jour, les américains donnent l’assaut sur le bourg de Plougastel-Daoulas. Plusieurs F.F.I de la compagnie parviennent à s’intégrer aux premières lignes, participant activement au combat de la Libération. Le 29 et 30 août, la Compagnie F.F.I de Plougastel-Daoulas occupe désormais le bourg. Des patrouilles sont menées dans les environs, permettant de capturer plusieurs prisonniers allemands, qui sont remis aux soldats américains.
Du 30 août au 24 septembre 1944, les patrouilles se poursuivent et à celles-ci s’ajoutent le barrage des routes, des missions de police générale, la récupération des cadavres et l’aide aux sinistrés. La situation ne plaît guère aux F.F.I qui souhaitaient poursuivre vers Brest les combats. Les nombreuses venues en camions des F.F.I de Landerneau, d’unités F.T.P et de la Marine nationale pour récupérer le matériel et les vivres abandonnés par les allemands exacerbent les tensions. Fin septembre 1944, les unités F.F.I sont dissoutes, les volontaires à poursuivre la Libération de la France convergent alors sur Landerneau pour souscrire un engagement dans l’Armée française en reconstitution. La plupart des engagés serviront sur les des fronts des poches de l’Atlantique, notamment à Lorient.
Après la Libération, Corentin Le Goff reprend ses activités professionnelles. Il est élu maire de Plougastel-Daoulas lors des élections de 1945. Il reste à ce poste jusqu’en 1947.