Louis Paul Le Grill et ses deux frères René et Jean sont nés en Allemagne, d’un père voyageur et d’une mère allemande. La famille réside au 7 rue Henri Barbusse à Lambézellec. Le père travaille dans les P.T.T. A l’entrée en guerre, Louis est tout jeune, il fait des études.
En 1943, la fratrie Le Grill entre en résistance et intègre le groupe de Georges Dauriac, un ami d’enfance. Cette bande devient alors le groupe Action Directe, futur corps-franc du mouvement Défense de la France.
Dans un premier temps, Louis diffuse la presse clandestine du mouvement. Il transmet des renseignements d’ordre militaire et sert également de coursier pour distribuer les fausses cartes d’identités que fabrique le mouvement. En février 1944, il intègre activement le groupe et bientôt est décidé de prélever dans les communes des tickets d’alimentation pour fournir aux réfractaires du Service du Travail Obligatoire (S.T.O).
Le 20 novembre 1943 [1] vers 20 heures, nouvelle opération pour se procurer des tickets d’alimentation mais cette fois à la mairie de Guilers. Yves Hall organise l’opération et emprunte pour l’occasion la voiture Renault Vivaquatre de son frère. Les résistants Roger Cabon, Jean Morvan, Francis Beauvais et Louis Le Grill sont de la partie.
Yves Hall raconte l’enlèvement des tickets
Nous avons garé la voiture à 50 mètres de la mairie, et nous avons frappé à la porte. Une femme est venue nous ouvrir et en voyant un révolver braqué sur elle, s’est mise à crier. Mais j’étais venu pour les tickets et il me les fallait coûte que coûte, mais nous devions faire vite. On nous les a donnés, ils étaient dans une caisse au premier étage. Quand nous avons démarré, il était temps ; tout le camp allemand était en révolution comme un rucher d’abeilles et le téléphone n’allait pas tarder à fonctionner. Je pris la route de Saint-Renan car je pensais bien que celle de Brest allait être barrée, coupais avant l’entrée du bourg à gauche pour rejoindre la route du Conquet par Bodonou ; je ne voyais presque rien avec mes phares qui étaient camouflés.
Tout à coup, je vis un mur devant moi, j’eu juste le temps de prendre mon virage mais restais enlisé dans le talus (Ndr : lieu-dit Trégorff). Un paysan nous aida à sortir de là. Il fallu deux chevaux pour sortir la voiture de cette ornière. Je le remerciais, lui disant que je repasserai le voir et repris la route pour Plouzané. Je rejoins la route du Conquet ; il m’est impossible de rentrer à cette heure pour remiser la voiture. Je décide de me garer dans un petit chemin pour y passer la nuit. Je remets les tickets à mes collègues qui vont rejoindre Brest et prendre le premier train de Saint-Pierre. Pour ma part je rentre à la ferme le lendemain matin vers 7 heures pour garer la voiture.
Dans le charivari de cette expédition, il y a quelques cartes d’alimentation éparpillées. Je les ramasse dans mes poches et revient à Saint-Pierre en vélo chez mes parents. On me demande où j’ai passé la nuit : je l’ai passée chez un copain à cause du couvre-feu. Je suis très fatigué et je vais dormir. Pendant que je dormais, mon linge étant souillé de boue, ma mère le prend pour le laver et découvre les cartes d’alimentation de la mairie de Guilers. Je suis obligé de lui avouer que je fais partie d’un groupe de résistance. Elle a déjà eu vent de l’attaque de la mairie de Guilers.
Le lendemain les recherches sont lancées par la police française et les allemands pour retrouver ces bandits qui ont dérobé près de 5 000 tickets. Yves Hall, par mesure de sécurité doit quitter sa famille pour une planque à Brest. Louis Le Grill semble également être inquiet car il se fait discret, il met ses activités de résistance en sourdine.
En mars 1944, le groupe Action Directe est touché par deux séries d’arrestations. La première les 9 et 12 mars, où pas moins de cinq résistants sont arrêtés. Le groupe prend alors des mesures de sauvegarde et doit restreindre ses actions mais le 22 mars une seconde vague d’arrestations les touche. La résistante Marie-Anne Stéphan et sa nièce sont arrêtées tandis que sur la place Guérin, le local du Camping Club subit une rafle. Tout le groupe est arrêté et rapidement relâché à l’exception de Louis et Jean Le Grill. Interrogés à Bonne-Nouvelle, les deux résistants sont ensuite transférés à la prison de Pontaniou. Les frères sont internés jusqu’au 20 mai 1944.
Nous ignorons le motif de leur internement. Dès sa sortie de prison, Louis rejoint les Forces Françaises de l’Intérieur (F.F.I) et participe aux opérations de libération du secteur de Brest. Nous ignorons également avec quelle unité il s’est battu.
Après la libération du secteur, il souscrit un engagement volontaire dans l’armée française pour la durée de la guerre. Il participe à la campagne d’Allemagne puis l’Indochine et reste dans l’armée jusqu’en 1951. Il démarre ensuite une carrière dans la gendarmerie.
Après guerre, le 25 octobre 1947, il épouse Jacqueline Vila à Brest.
Nous cherchons à mettre un visage sur son histoire, si vous avez une photo de lui, n’hésitez pas à nous contacter.