Eugène Louis Muller est ouvrier d’usine à Valentigney en 1906, quand il est appelé à effectuer son service militaire. Libéré en 1908, après deux années sous les drapeaux, Eugène Muller fait un passage à Brest entre 1909 à 1910, au 60 rue de Paris à Lambézellec, chez son grand-frère Jules Muller (1879-1921), mécanicien automobile. Il file ensuite poser ses valises à Vannes, où il épouse Marie Lecomte, le 3 juin 1911 [1].

Quand la Première Guerre mondiale éclate, Eugène Muller est rappelé à l’activité et dès la fin du mois de septembre 1914, il est au front avec le 2ème Régiment d’infanterie coloniale (2e R.I.C). Grièvement blessé le 14 juillet 1915, on doit lui amputer la jambe gauche. La guerre s’achève pour Eugène Muller, qui se retire à Brest. Pour sa tenue au front, il nommé Chevalier de la Légion d’honneur et décoré de la médaille Militaire et de la Croix de Guerre 1914-1918, avec palme.

De retour à la vie civile, Eugène Muller trouve un emploi comme comptable. Dans la modeste maison qu’il occupe avec sa mère au 4 rue Richelieu, réside également Marie Bodénez, une jeune mère célibataire. Elle s’occupe de son fils Henri (1914-1954) et donne naissance en juin 1916, à son second fils prénommé Louis. Eugène Muller semble être en bons termes avec cette jeune femme puisqu’il accompagne la sage femme pour la déclaration de naissance en mairie. Le sort n’est pas tendre avec ces deux jeunes enfants, car leur mère succombe un an après, en juin 1917. Eugène Muller et sa mère Catherine Goux (1857-1942) adoptent alors les deux frères et les élèvent [2].

Chauffeur de taxi à Brest dans les années 1920, Eugène Muller a déménagé non loin, au 4 rue Inkermann avant de partir s’installer comme receveur buraliste au bourg de Plouescat, avec sa mère et ses enfants adoptifs. C’est là que la Seconde Guerre mondiale le trouve. Non mobilisable, il voit les Allemands arriver et s’installer dans le bourg et sur la côte.

En septembre 1943, il semble donner son adhésion à la Résistance qui se forme dans le secteur. Nous ignorons pour le moment l’identité de son recruteur. Les membres s’affilient bientôt au mouvement Défense de la France (D.F). Eugène Muller est à la manœuvre en sa commune et recrute, avec l’aide de son fils Louis, des volontaires prêts à prendre les armes. Le groupe est en relation avec les responsables du canton et ceux de Lesneven. Le groupe va compter une douzaine de membres avant le débarquement en Normandie. Outre le recrutement, on s’attèle à la propagande, aux faux papiers et à la transmission d’informations sur l’ennemi.

Le 10 avril 1944, Louis Bodénez-Muller est contrôlé par une patrouille allemande à Tréflez. Revenant de Lesneven à bicyclette, il transporte de l’armement destiné à la formation de son groupe (un revolver). Conduit à Brest pour interrogatoire, une perquisition est menée au domicile familial le jour même. Lors de celle-ci, Eugène Muller est arrêté tandis que l’on trouve sur place d’autres armes et surtout une liste de résistants. Lors des interrogatoires, il semble que les Allemands aient cherché prioritairement à en savoir plus sur la hiérarchie.

Dans les jours qui suivent l’occupant cherche à mettre la main sur Joseph Barach, le responsable de la Résistance pour les cantons de Guissény et Plouescat et sur l’un des fils d’Henriette Berder. Par chance aucun d’eux ne sont appréhendés. Ne désarmant pas, les Allemands organisent vers 6 heures du matin le 2 mai 1944, une rafle à Plouescat pour démanteler le groupe. Sont particulièrement visées les personnes dont les noms figuraient sur la liste.

Membres des F.F.I de Plouescat arrêtés le 2 mai 1944 :
L’AMINOT Louis
L’AZOU François
L’AZOU François
L’AZOU Jean-Marie (✝)
L’AZOU Yves
OUPIER Paul
PIRIOU Yves
PLEIBER François
PORHEL François (✝)
SEITÉ Jean-Louis
TOULLEC Vincent

Dans le village, d’autres personnes sont arrêtées arbitrairement durant la journée. Des munitions seront trouvées chez Emile Boucher, tandis que 7 autres personnes sont maintenues en détention, pour différents motifs. Les F.F.I et les civils sont conduits à Brest pour y être interrogés. Ils sont alors tous internés à la prison de Pontaniou. Les civils sont relâchés quelques jours plus tard mais pour les F.F.I, le calvaire est tout autre. Eugène Muller et ses camarades d’infortune sont transférés au camp Marguerite à Rennes le 13 juin 1944. Placé dans le dernier convoi quittant Rennes à l’approche des américains le 3 août 1944, il parvient à être libéré par les Alliés à Belfort fin août 1944.

Rapatrié dans la région brestoise, il entre en convalescence auprès de la famille de sa sœur à Guipavas. En 1946, il est promu officier de la Légion d’Honneur. Il réside ensuite un temps à Berven en Plouzévédé avant de définitivement revenir sur Brest pour ses vieux jours. Il s’installe chez son fils Louis, au 31 rue de la République.

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