Eugène Marie Kerbaul est le fils d’un charpentier et d’une mère paysanne, puis couturière à domicile. Il commence à travailler très jeune comme apprenti typographe à la mairie de Saint-Marc puis il devient facteur auxiliaire aux Postes, télégraphes et téléphones (P.T.T). À Brest, il réside au 8 rue Mgr Graveran.
Il entre très tôt dans le militantisme, intègrant les Jeunesses communistes en décembre 1935 puis le Parti communiste français (P.C.F) en janvier 1936. Très actif et impliqué au sein du parti, il devient l’un des trois responsables brestois du P.C.F après l’interdiction de celui-ci suite au Pacte germano-soviétique. Eugène Kerbaul participe à la reformation du P.C.F dans la clandestinité quand il est appelé à servir sous les drapeaux en novembre 1939. Fait prisonnier en Charente-Maritime en juin 1940 lors de la Campagne de France, il s’évade 3 semaines plus tard du frontstalag de la Jarne, près de La Rochelle. L’armistice signé, Eugène Kerbaul est démobilisé en Zone non occupée et parvient à regagner la cité du Ponant en début septembre 1940. Le militant communiste reprend alors son poste de responsable, toujours dans la clandestinité. Les premiers mois d’occupation sont tumultueux et l’inquiétude domine.
En janvier 1941, l’interrégional du parti, Robert Ballanger, vient à Brest et rencontre Eugène Kerbaul, Jules Lesven et Roger Chaigneau pour initier à Brest l’Organisation Spéciale (O.S) ; structure para-militaire dont les buts premiers sont la protection des membres du P.C.F et l’enclenchement de représailles (attentats et sabotages) envers les troupes d’occupation. Pour sa part, Eugène Kerbaul monte la branche O.S Bâtiment avec Jean-Pierre Reste et Alain Le Moal pour agir sur le chantier allemand de Kerguillo à Bohars, où il travaille désormais. Ils effectuent quelques petits sabotages, retardant l’implantation dans ce manoir, de l’état-major de la Luftwaffe pour le Nord de la Bretagne. En avril 1941 il quitte cet emploi et entre dans une société de récupération de métaux non-ferreux qui opère dans l’arsenal. Ce nouveau poste lui offre l’opportunité de rester en contact avec des communistes de la branche O.S Arsenal et ensemble, de réaliser des sabotages. Parmi les sabotages, citons le dépôt de poudre d’émeri dans des boîtiers de graissage, le sabotage d’une grue ou le chargement à outrance de wagons. Il profite également pour militer et diffuser la presse clandestine ainsi que des tracts aux ouvriers de l’arsenal.
Sur le plan propagande, Robert Ballanger revient à Brest fin janvier et annonce à Eugène Kerbaul que La Bretagne Ouvrière va reparaître clandestinement. l’interrégional confie alors au brestois la tâche d’en tirer à Brest. C’est chose faite à partir d’avril 1941, avec l’aide considérable de Jules Lesven et Pierre Corre. Eugène Kerbaul relance une imprimerie clandestine à Brest, permettant ainsi de faire reparaître le journal régional du P.C.F. En mai 1941, malgré la période, Eugène Kerbaul se fiance. Quelques temps après, il organise localement l’implantation du Front national de lutte pour la libération et l’indépendance de la France (F.N). Ce mouvement de rassemblement de Résistants autours de valeurs patriotiques ne prendra pas dans la région, trop marqué par les conflits datant des années 1930.
Peu de temps après, il apprend qu’une enquête de la police française de Vichy s’intéresse à lui. Il demande alors qu’on lui confectionne de faux papiers en prévision de quitter Brest mais le 5 juillet 1941 il est arrêté. Eugène Kerbaul se voit interné au camp de Châteaubriant puis à partir de mai 1942, au camp de Voves. Lors de son internement, il continue de militer et participe activement au groupe de prisonniers qui organise des évasions.
Le 10 janvier 1943, Eugène Kerbaul s’évade à son tour et gagne la région parisienne où il retrouver Robert Ballanger. Après un temps à résister dans la région parisienne, il échappe à une nouvelle arrestation et se réfugie dans le Nord pour se mettre au vert. Il adopte alors pour la fausse identité d’Arthur Devos et devient officier des Francs-Tireurs et Partisans (F.T.P). Il prend part aux combats de la Libération dans la région de Lille. A l’issue de la Libération, il est de nouveau mobilisé dans l’Armée française jusqu’en août 1945.
Eugène Kerbaul est récipiendaire des distinctions suivantes :
– Médaille de la Résistance française, avec rosette (1946)
– Croix de Guerre 1939-1945, avec palmes
– Médaille des Évadés
– Médaille des combattants volontaires de la Résistance
– Médaille des internés résistants
Après guerre, il se marie en novembre 1945. Eugène Kerbaul devient journaliste, puis typographe à la rédaction de l’Humanité. Il poursuit son militantisme et s’investit pleinement dans la rédaction de nombreux articles sur l’histoire du mouvement ouvrier en Bretagne et plus particulièrement dans le Finistère. Il fait également partie des fondateurs du musée de la Résistance nationale (M.R.N). Entre 1985 et 1992, il rédige la prosopographie des militants et résistants communistes de Brest. Il est l’une des principales sources de renseignements sur ce mouvement de Résistance, tant son travail et les renseignements fournis sont importants, à l’heure où internet n’existait pas. Le Pôle Jean Moulin a mis en accès libre et gratuit son livre sur les Militants du Finistère et les deux cahiers de mise à jour.