POCHON Edmond

Edmond Victor Aimé François Pochon réside à Brest au début de l’occupation allemande et travaille comme mécanicien-dentiste. Il exerce auprès du docteur Coquelin jusqu’en 1941. Les importants bombardements sur Brest à cette période provoquent des évacuations et réorganisations à Brest.

Je suis arrivé à Landerneau fin 1941 à la suite de l’évacuation par les Allemands de mon quartier du Merle Blanc entre la gare et le port de commerce à Brest. Comme je faisais du foot à l’Armoricaine, je me suis rapproché des Gars d’Arvor. J’ai rencontré Fanchic Pengam (François était surnommé Fanchic) et Jean Rozec, avec qui je me suis lié d’amitié en dehors du patro (patronage des Gars d’Arvor). Nous sortions ensemble le dimanche au match et dans les pardons de la région, faisions beaucoup de sport, plus particulièrement du vélo.

En semaine, Edmond Pochon continue de se rendre à Brest pour exercer auprès du docteur Glérant jusqu’en février 1942. A compter de ce mois, il s’installe à Landerneau et travaille chez un chirurgien-dentiste.

Il entre en Résistance en août 1943, au sein du mouvement de l’Organisation de la Résistance de l’Armée (O.R.A), qui forme un groupe à Landerneau autour du négociant en bois Joseph Radenac. Il prend part au service de renseignements et aux distributions de tracts et journaux, notamment avec François Pengam. Durant la clandestinité, il sera également en rapport avec Jean Hernot et Henri Lambert.

Herbert Schaad évoque le déclenchement d’arrestations à Landerneau :

Un soir, le jeune Leclerc Edouard, qui m’avait auparavant fourni des renseignements, est venu me trouver à la Kommandatur pour me signaler toute une liste de personnes de Landerneau, qui s’absentaient fréquemment la nuit et qui devaient surement faire partie de la Résistance. Sur cette liste figurait le nom de Pengam père. Le lieutenant décide une opération qui fut effectuée deux ou trois jours après. Leclerc Edouard nous accompagna pour nous indiquer les domiciles des personnes qu’il avait désigné.

Le 21 mai 1944, Edmond Pochon est arrêté avec François Pengam, pour fait de Résistance par le Kommando allemand I.C 343 de Landerneau. Ce jour là, c’est près d’une vingtaine d’arrestations qui sont effectuées à Landerneau.

Edmond Pochon décrit son arrestation et sa détention :

Le dimanche 21 mai 1944, je descendais de Saint Houardon avec 7 ou 8 copains. En arrivant au pont de Rohan, j’ai vu ma mère qui arrivait ; et au même moment, j’ai été cravaté, je n’ai rien vu venir. J’ai été le seul arrêté. Amené chez moi, la maison a été entièrement fouillée y compris chez les voisins, l’un d’entre eux a également été embarqué car il avait chez lui une chemise kaki. Sur le chemin, un copain m’a fait un signe, il a été lui aussi emmené. Nous avons été mis en cellule environ une quinzaine dans la même pièce. Le soir nous avons pu sortir pour aller aux toilettes, j’ai vu un camarade qui avait « dérouillé » bien qu’à ma connaissance, il ne faisait pas partie d’un réseau. Je n’ai pas vu Fanchic.

Au fil des jours et des interrogatoires, la cellule s’est vidée, je me suis retrouvé seul. Une nuit j’ai entendu Fanchic appeler : « Edmond ! pour toi ils ne savent rien, j’ai tout pris sur moi, ferme ta gueule et tu t’en tireras ». Cette même nuit, vers 5 heures du matin, il y a eu du bruit dans le couloir et dans la cellule de Fanchic. Il y avait dans la porte de la cellule une ouverture en losange qui permettait de nous surveiller. Je suis petit, je n’ai pas vu directement Fanchic partir, j’ai vu uniquement le haut des fusils et je pense qu’il avait été enchaîné car j’ai encore dans l’oreille le bruit des chaînes. J’ai été libéré plus tard. Quel jour ? Je ne me souviens plus. Schaad est venu me voir et m’a dit : « On sait que vous faites partie de la résistance, nous n’avons pas de preuves contre vous mais on vous aura. Avant de vous laisser partir, je vais vous donner à manger », et j’ai eu une assiettée de maïs.

Sitôt relâché, il se fait discret quelques jours avant de prendre le maquis avec Louis Coat et sept autres résistants de Landerneau. Le groupe se dirige sur Dirinon et s’établit dans l’école Sainte-Nonne où ils sont hébergés par les religieuses. C’est la naissance du Commando de Landerneau, qui prend bientôt l’appellation de Section Spéciale Pengam (S.S.P) en hommage à leur ami François Pengam, fusillé à Brest le 27 mai 1944.

Dans ses mémoires, Edmond Pochon évoque la présence des allemands au château de Lesquivit. Cette garnison ne quittant la commune qu’en juillet, cela permet de définir approximativement la date d’arrivée des résistants à Dirinon. Les actions sont très modestes au début, il s’agit avant tout de s’armer et de garder les liaisons avec les autres groupes de Résistance du secteur en attendant les consignes de l’état-major.

Dans la nuit du 2 au 3 août 1944, un parachutage d’armes est prévu pour la région de Landerneau entre Pencran et Tréflévenez. Celui-ci est annulé, laissant les nombreux groupes de Résistants du secteur dans le désarroi. Le groupe maintient sa présence dans le secteur et se raccroche notamment aux parachutistes S.A.S du 3e R.C.P - 2e Squadron pour des opérations jusqu’à la prise de Landerneau. Ils s’associent ensuite officiellement aux F.T.P du Bataillon Georges Le Gall.

Le groupe reçoit la consigne d’interdire tout passage de train sur la ligne Quimper-Landerneau. Ils retournent occuper Dirinon entre le 13 et 17 août 1944 pour tenir en respect les allemands encore dans la poche de Plougastel. Ils effectuent également des opérations de filtrage pour débusquer des allemands en civil ou des collaborateurs. Des combats se déroulent à la gare de Dirinon entre les allemands et le groupe de Jean Hernot, la S.S.P monte en renfort. Les opérations militaires se poursuivent, notamment aux côtés des américains pour la prise du poste d’écoute et des projecteurs de Ty-ar-Moal et Saint-Claude. Le 26 août 1944, il est blessé à la main droite par un éclat d’obus. Ce n’est pas le seul blessé et ils doivent se replier pour donner les premiers soins et évacuer les blessés sur le poste de secours américain. Fin août 1944, le groupe occupe le bourg de Plougastel, Edmond Pochon se rappelle avoir aidé un américain à rassembler des morceaux du calvaire endommagé par un bombardement.

Le groupe se dirige ensuite vers Kerhuon et Guipavas avant une avancée vers la poche du Conquet grâce à leur traction avant empruntée. Finalement, c’est aux côtés de la 1ère Compagnie F.F.I de Fusiliers-Marins de Brest, que la S.S.P participe aux combats de réduction de la poche allemande de Brest. Ils font partie des rares groupes à combattre dans les rues de la Cité du Ponant. Il est blessé une seconde fois dans les combats dans la rue Jean Jaurès à Brest le 10 septembre 1944 par l’explosion d’un obus.

Après la Libération il rejoint Landerneau et s’engage dans l’Armée française jusqu’à la capitulation allemande. Il est démobilisé en juin 1945.

Pour son action clandestine, il est cité à l’ordre de la division, lui conférant la Croix de Guerre 1939-1945, avec étoile d’argent.

Publiée le , par Gildas Priol, mise à jour

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Portfolio

Après la Libération, route de Paris à Morlaix
De gauche à droite : Edmond Pochon, Jean Le Page et Louis Le Dall.
Cale de Logonna, mai 1944
De gauche à droite : Jean Rozec, François Pengam et Edmond Pochon.
Balade à vélo, mai 1944
De gauche à droite : Jean Rozec, Edmond Pochon et François Pengam.
Libération de Landerneau (Août 1944)
Photo prise par un employé communal au P.C F.F.I de Landerneau, au dépôt Javel Lacroix.
Crédit photo : francois.pengam.1944.free.fr

Sources - Liens

  • Archives départementales du Finistère, dossier de combattant volontaire de la Résistance (1622 W 3).
  • POCHON Edmond, témoignage recueilli par la famille de François Pengam.
  • François Pengam - Landerneau - 1944, documents, témoignages et iconographie.
  • Archives F.F.I de l’arrondissement de Brest, documents relatifs au Bataillon F.T.P Georges Le Gall.
  • Archives municipales de Brest, fonds Joël Le Bras, copie de la déposition d’Herbert Schaad (153 S 12).
  • Service historique de la Défense de Vincennes, dossier d’homologation des faits de résistance (GR 16 P 482629) - Non consulté à ce jour.

Remerciement à Françoise Omnes pour la relecture.