LE SIGNE Gabriel

Gabriel Le Signe nait le 24 avril 1895 au village de Kermarron, en Ploaré – commune rattachée à la ville de Douarnenez en 1945 [1]. Ses parents, Pierre et Armande, née Hénaff, sont cultivateurs. Ils tiennent une ferme, exploitée par la famille. Un oncle et une tante sont restés sur l’exploitation, deux domestiques complètent la main d’œuvre de la ferme. Gabriel est le cinquième enfant d’une fratrie de six enfants.

Engagé en 1914 dans la campagne de France, il est démobilisé en août 1919. Il a fait toute la guerre dans l’infanterie : à la fin de la guerre il est au 7ème Régiment d’infanterie colonial (7e R.I.C). En juillet 1920, il épouse Germaine Larhantec, originaire de Ploaré. Il perpétue l’exploitation familiale, avec son frère André.

Le 17 janvier 1944, deux aviateurs alliés, Hall, un américain et Zanam, un indien (RAF), sont cachés à Kermarron. Le 2 février, ils sont pris en charge par M. Le Bris, syndic des gens de mer au quartier de Douarnenez et dirigés vers L’Ile-Tudy, où embarquent sur le Jouet des flots de Douarnenez, plusieurs personnalités. À son bord, une vingtaine de passagers, dont Pierre Brossolette et le lieutenant de vaisseau Le Hénaff, chargé de l’exfiltrer. Le navire, malmené par la tempête, dans la nuit du 3 février, est victime d’une voie d’eau ; il aborde la crique de Feunten Aod, Plogoff, dans le Cap Sizun. Pierre Brossolette est arrêté à Audierne.

L’Américain Hall revient à Kermarron et y reste quelques jours. La ferme est le lieu de réunions de Libération Nord (L.N) et reçoit régulièrement la visite des chefs du mouvement dans la région de Douarnenez. Germaine et Gabrielle sont alors chargées du guet. Les chefs de Libération Nord (L.N), Le Bris et Le Bars, entrent en clandestinité en février 1944. Ce mois, le principe d’une fusion entre Libération Nord (L.N) et le Front National (F.N) est acquis. En avril 1944, un conseil cantonal est créé, regroupant l’Organisation de Résistance de l’Armée (O.R.A), le mouvement Libération Nord (L.N) et le Front National (F.N).

Charles Hélias reçoit la responsabilité du secteur de Ploaré et représente L.N. Le territoire est découpé, Douarnenez et Ploaré formeront la 2ème Compagnie des Forces françaises de l’intérieur (F.F.I). La partie Est du canton est confiée à l’O.R.A, avec la 1ère Compagnie F.F.I.

Ces deux compagnies vont souffrir le 21 juillet 1944, de la rafle organisée par les Allemands. Le 1 er mai 1944, le S.D essaie d’arrêter M. Le Bris, chef cantonal de L.N, qui se réfugie à la ferme. Gabrielle est alors chargée de préparer son départ vers Pont-Croix. Le 26 mai 1944, une liaison formelle est établie avec Roger Bourrières, représentant Mathieu Donnart – Chef départemental des F.F.I.

Le même jour une grande rafle a lieu à Tréboul (aujourd’hui commune de Douarnenez) qui
désorganise le dispositif de la Résistance. À compter du 28 mai, le recrutement de maquisards s’accélère. Les F.F.I de la région de Douarnenez peuvent compter sur une centaine d’hommes en armes et une réserve de plus de 400 mobilisables. Les parachutages prévus ne peuvent avoir lieu, la présence de troupes allemandes dans le secteur étant très forte.

La ferme de Kermarron a déjà hébergé plusieurs maquisards. Le 21 juillet, neuf personnes se trouvent dans la maison : Gabriel Le Signe (49 ans) , Germaine son épouse (43 ans), Germaine et Gabrielle leurs enfants âgés de 22 et 19 ans, André Daux (alias François Kervarec) réfractaire originaire de la région parisienne (32 ans), Jean Morlaix un prisonnier évadé et recherché (26 ans), Jean Midi journalier originaire de Pouldergat et Joseph Le Corre résistant de Pont-Croix.

Ce jour là, une trentaine de soldats allemands cernent la ferme à 6 heures du matin. Les personnes sont alignées dans la cour de la ferme pendant 3 h 30, sous la garde d’une mitrailleuse. Pendant ce temps, l’ensemble des bâtiments sont fouillés. Joseph le Corre est resté couché, atteint de deux balles dans le genou et la cuisse trois semaines auparavant. Germaine Le Signe tente de le sauver en indiquant que c’est est domestique et qu’il a été blessé d’un coup de faux dans la cuisse. L’officier inspecte la plaie de la cuisse, une
forte entaille, mais ne vit pas la blessure du genou. Joseph le Corre put rester à Kermarron.

Vers 9 heures, n’ayant rien trouvé de suspect, les soldats regroupent les hommes raflés dans le secteur. Le Kommando de Landerneau est à la manœuvre : il a infiltré un de ses membres, se faisant passer pour un Lorrain, enrôlé de force et qui voulait déserter. Muni de faux papiers et de vêtements civils, il infiltra la compagnie et la rafle fut déclenchée le 21 juillet, avec l’aide des parachutistes du général Ramcke.

Au total, une soixantaine de personnes, dont onze sont retenus et enfermés au préventorium de la Clarté, en Kerlaz, lieu de casernement des parachutistes. Le 30 juillet, le groupe de résistants est transféré en soirée par camion. Pendant ce temps, Germaine et Joseph Le Corre restent à Kermarron, tandis que les deux filles du couple sont mises à l’abri sous la responsabilité de Mme Lelgouac’h, propriétaire de l’Hôtel des Sables, de Tréboul. La situation reste périlleuse, les Allemands cherchant à savoir comment Le Corre avait été blessé et qui le soigne. Le groupe est scindé en deux. Le 31 juillet 1944, un tribunal militaire se réunit à Landerneau et condamne à mort Joseph Boulic (né le 29 mars 1922 à Kerlaz), Joseph Brouquel (né le 20 décembre 1918 à Kerlaz), Henri Guéguen (né le 16 février 1915 à Ploaré), Thomas Le Moan (né le 17 octobre 1914 à Ploaré), Pierre Lucas (né le 25 mai 1925 à Ploaré), Alain Strullu (né le 19 juillet 1916 à Esquibien). Ils sont fusillés le lendemain dans le bois du Pontois, dans un camp parachutiste de la Roche-Maurice. Leurs corps seront retrouvés le 10 août 1944 dans une casemate, habillés en bleus de chauffe et entravés par du fil de fer. Le mode opératoire ressemble à celui usité par le Kommando de Landerneau, lors d’autres opérations.

Le second groupe, sur lequel des recherches complémentaires sont nécessaires, est remis au S.D et transféré à la prison de Pontaniou à Brest. Il s’agit de Gilles Cornic, François Kergoat, Jean Le Berre, Jean-Noël Le Berre et Gabriel Le Signe.

La famille reçoit le 11 octobre 1944, une lettre de Gabriel le Signe en provenance de
la prison de Pontaniou, datée du 2 août. Le 1 er août 1944, trois soldats allemands reviennent à la ferme, exigeant d’être nourris. Quelques heures avant cette visite, des résistants étaient passés à la ferme. Le lendemain, les parachutistes se replient sur Brest.

Le 4 août, la mobilisation des F.F.I est en cours. Alors que la présence de Gabriel est attestée à Brest, par le courrier envoyé à sa famille et les témoignages recueillis après-guerre, un jugement de déclaration de décès, daté du 2 février 1948, le déclare mort en Allemagne. Une mention du 18 janvier 1996 précise : Mort en déportation.

Le 7 août 1944 au petit matin, Gabriel Le Signe et ses camarades de la première Compagnie F.F.I sont exécutés à Brest. La décision de l’exécution fut prise sans doute le 2 ou le 3 août 1944. Le 7 août, la forteresse de Brest déclare en début d’après-midi l’état de siège. Les Américains sont aux portes de la ville.

Son épouse Gabrielle Le Signe fut reconnue comme membre de la Résistance et s’engagea dans les F.F.I, début août 1944.

Publiée le , par Jean-Yves GUENGANT , mise à jour

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Portfolio

Gabriel Le Signe durant la 1ère Guerre mondiale
Mariage de Germaine Larhantec et Gabriel Le Signe (1920)
Gabriel Le Signe et ses deux filles, Germaine et Gabrielle
Crédit photo : M. Grégory Le Bris

Sources - Liens

  • Famille Le Signe, documents et iconographie (2023).
  • Archives départementales du Finistère, registres d’état civil de Ploaré (naissance, 3 E 203/37/5 ; mariage, 3 E 203/44/9), recensements de 1896, 1926 et 1931 (6 M 514/1,6,7).
  • Ordre de la Libération, registre des médaillés de la Résistance française (J.O du 26/04/1958).
  • Le Maitron, notices biographiques des F.F.I Joseph Boulic, Joseph Brouquel, Henri Guéguen, Thomas Le Moan, Pierre Lucas et Alain Strullu.
  • POUTY Thomas, notes personnelles (dossiers DAVVC, Caen).
  • Service historique de la Défense de Vincennes, dossier d’homologation des faits de résistance (GR 16 P 215329) - Non consulté à ce jour.
  • Service historique de la Défense de Caen, dossier individuel de Gabriel Le Signe (AC 21 P 480 935) - Non consulté à ce jour.
  • Archives départementales du Finistère, dossier de combattant volontaire de la résistance (1622 W 56) - Non consulté à ce jour.

Remerciements à Françoise Omnes pour la relecture de cette notice.

Notes

[1Il est enregistré, par erreur de l’état-civil, sous le prénom de Gabrielle-Marie, de sexe féminin.