Joseph François Abasq est le fils d’une couturière et d’un quartier-maître chauffeur. Scolarisé dans sa jeunesse à l’école Bonne-Nouvelle à Lambézellec et probablement à la Croix Rouge où il aurait passé son certificat d’études primaires en 1934. Durant sa jeunesse, il est également membre du patronage laïque de Saint-Marc. Joseph Abasq réside en famille au 21 rue Dixmude à Saint-Marc et travaille ensuite comme ouvrier électricien. Trop jeune pour être mobilisé à la déclaration de la Seconde Guerre mondiale, il reste à Brest lors de la débâcle.
Au début de l’occupation allemande, Joseph Abasq semble être sans emploi. Dans la soirée du dimanche 25 août 1940, il se promène de Brest à Plougastel en compagnie de onze camarades, dont Albert Kerguélen, Louis Pehoré et Bertrand Fréché. Après s’être arrêté dans un restaurant pour se désaltérer, le groupe décide de regagner la cité du Ponant. Près du Pont Albert Louppe, Albert Kerguélen et Louis Pehoré, qui devancent leurs camarades, repèrent une ligne téléphonique allemande qui longe la route. Les deux comparses saisissent alors l’opportunité et sectionnent la ligne.
Quatre jours plus tard, le jeudi 29 août 1940, Albert Kerguélen retrouve Bertrand Fréché et Joseph Abasq. Il les informe de son acte de sabotage et indique son souhait de réitérer ce genre de sabotages, pour nuire aux Allemands, ennemis du peuple français [1]. Bertrand Fréché et Joseph Abasq acceptent de prendre part à ces actions clandestines. Rendez-vous est pris pour le lendemain soir.
Le 30 août 1940, comme convenu la vielle, Albert Kerguélen se rend dans la soirée chez Joseph Abasq. Ce dernier emporte une pince, puis les deux camarades partent chercher Bertrand Fréché. L’intéressé est semble t-il bien occupé mais devant l’insistance de ses deux amis, il finit par céder et les accompagne. Le trio de jeunes saboteurs s’éloigne de Brest en direction de Guipavas. Joseph Abasq prit de peur, se contente de faire le guet pendant qu’Albert Kerguélen et Bertrand Fréché sectionnent la ligne. En revenant sur leurs pas, une nouvelle ligne offre une seconde possibilité pour nuire à l’occupant. Malgré le panneau avertisseur d’une peine de mort en cas de sabotage, les jeunes brestois grimpent aux pylônes et coupent les fils. Sitôt fait, ils ne s’attardent pas et regagnent leurs domiciles.
Dans ses mémoires de guerre parues en 1960, le maire de Saint-Marc - Yves Jaouen, indique que sept jeunes gens formaient un groupe qui réalisait des sabotages et qu’ils furent pris sur le fait puis emprisonnés par la police allemande en septembre 1940. Si cette version évoque bien le Groupe Kerguélen, il y a approximation dans les souvenirs.
Sans que l’on sache ce qui a mené les enquêteurs sur sa trace, Joseph Abasq indique avoir répondu à une convocation de la gendarmerie française de Brest, en se rendant dans leurs locaux rue de Portzmoguer le 1er septembre 1940. Sur place, il est mis en état d’arrestation avant d’être remis aux autorités allemande d’occupation. Interné à la prison de Pontaniou Joseph Abasq et ses six autres camarades attendent leur jugement. Durant ce laps de temps, les autorités locales françaises se démènent pour prendre leur défense. Le 8 septembre 1940, trois des sept jeunes sont libérés, vraisemblablement faute de preuve et d’aveu.
Par contre, Joseph Abasq, Bertrand Fréché, Albert Kerguélen et Louis Pehoré sont gardés en détention. Les quatre saboteurs sont jugés le 11 septembre 1940, par le tribunal militaire allemand de la Feldkommandantur 752, rue Voltaire à Brest. Plus vieux des quatre accusés, Joseph Abasq est celui sur lequel on fait peser le plus de responsabilités.
« Der Angeklagten ABASQ, ist 19 Jahre alt und daher für sein Verhalten voll verantwortlich. Es war daher über ihn die im Gesetz festgesetze Todesstrafe zu verhängen. Dies erschien auch dadurch gerechtfertigt, daß er als der alteste seine jüngeren Kameraden von ihrem mit dieser Strafe bedrohten Vorhaben hätte abhalten müßen. Wenn er dieses unterließ und sich in der Tat beteiligte, so nahm er damit die angedrohte Strafe auf sich. »
Traduction :
« L’accusé Abasq a 19 ans et est donc entièrement responsable de son comportement. Il s’agit donc de lui imposer la peine de mort prévue par la loi. Cela se justifie par le fait que, en tant qu’aîné, il aurait dû prévenir ses jeunes camarades des conséquences de leurs actions. Si il a omis de le faire et a participé, il a accepté la menace de punition. »
Le verdict tombe, Joseph Abasq est condamné à mort, Albert Kerguélen est lui condamné à 10 ans de prison, Bertrand Fréché à 8 ans et Louis Pehoré, benjamin de l’équipe, écope d’une peine de 2 ans. Après avoir appris le verdict, le maire Yves Jaouen tente de nouvelles démarches pour obtenir des réductions de peines. Il se rend à Paris puis Quimper. L’administration militaire allemande accepte au bout de quelques jours de commuer la peine de mort en 10 années de prison pour le cas de Joseph Abasq. Les autres peines sont maintenues.
Les inculpés sont transférés le 29 octobre 1940, à la prison Jacques Cartier de Rennes. En janvier 1941, ils sont transférés à Saint-Brieuc où ils restent jusqu’en juillet 1942. Joseph Abasq passe ensuite par Fresnes, Troyes et pour finir Chalons-sur-Marne d’où il est déporté le 22 août 1942 en direction de l’Allemagne. Il passe dans les camps de Kassel , Frankfurt/Main, Kassel, Hannover et Wolfenbüttel. Libéré par l’Armée américaine le 11 avril 1944, Joseph Abasq est rapatrié le 23 avril 1945 et arrive en France le mois suivant.
Le 30 juin 1947, il épouse à Plougonvelin Gabrielle Chardonnet (1928-2003) qui lui donne trois enfants. Joseph Abasq travaille ensuite comme électricien jusqu’à son décès prématuré en 1969.
Après guerre, pour obtenir son homologation de déporté résistant, Joseph Abasq est rattaché de manière administrative au Groupe Élie, semant au passage une certaine confusion sur son appartenance à cette organisation clandestine. Pour son action de résistance, il reçoit la médaille Militaire et la Croix de Guerre 1939-1945 avec palme en 1960 et la Croix du Combattant Volontaire 1939-1945. Il est également nommé au rang de Chevalier de la Légion d’honneur en 1961, sur proposition d’Alice Abarnou.
La sépulture de Joseph Abasq se trouve dans le cimetière de Saint-Marc à Brest [Carré 9, Rang 10, Tombe 10]